Le 14 mars dernier, Mélanie Ségard – 21 ans – a réalisé son rêve en présentant en direct la météo sur une chaîne de télévision nationale. 5,3 millions de personnes l’ont regardée, un record d’audience pour la chaîne avec 20,7% des parts de marché. Incroyable ? Certainement pas banal en tout cas, d’autant plus que la jeune femme est atteinte du syndrome de Down. Dans l’objectif de mieux faire connaître du public ce que l’on nomme aussi la trisomie 21, Mélanie a lancé un appel sur un réseau social et la viralité a fait le reste pour le résultat que l’on sait. Un pas de plus vers l’empowerment des personnes atteintes de handicap dans une bataille de longue haleine pour changer les regards.
Une question de regard
Pour de nombreuses raisons le handicap – quel qu’il soit – tend à provoquer une réaction ambigüe de la part des valides. Culpabilité inconsciente, peur totalement irrationnelle d’être « touché » à son tour, prise de conscience des limites et de la fragilité des êtres humains… Le regard des valides sur les personnes atteintes de handicap peut être alourdi de toutes ces préconceptions. Comme une sorte de jeu de miroir par lequel on s’identifie pour mieux se distancier en fin de compte. Ce qui sort donc « du moule » interroge notre conception de la «normalité ». Normal, différent, pas normal, fragile, pas fragile : comment faire pour casser les préjugés et parvenir à une acceptation sans préjugés ni tabous ?
Des temps qui changent
Peut-être parce que nous vivons des temps de crises – sociétale, financière, politique – la notion de vulnérabilité a pris un sens nouveau auprès du grand public. La « culture de la gagne » a été mise à rude épreuve par la réalité du monde et on a moins peur d’afficher sa fragilité car elle correspond à une époque éprouvante. Cette empathie « forcée » par la conjoncture amène à relativiser la notion de fragilité, du moins à réfléchir dessus. C’est donc un premier pas vers l’échange et la curiosité envers les personnes qui, de naissance ou suite à un accident, ont été fragilisées dans leur développement physiologique, sensoriel, intellectuel ou relationnel. Et nombreux désormais sont les films, les séries et les documentaires qui interrogent librement le rapport des personnes atteintes de handicap au monde qui est le leur – et le nôtre.
Des mesures concrètes
Le 10 mars 2017 le gouvernement français signait un contrat de développement avec les acteurs de l’inclusion professionnelle au bénéfice des travailleurs en situation de handicap. L’objectif : créer 5 000 postes en 5 ans pour les personnes atteintes de handicaps mais également moderniser les équipements professionnels et travailler au développement des compétences des salariés.
Un chantier urgent pour notre pays où on comptabilisait en 2016 21 % de personnes handicapées au chômage, contre 10 % pour la moyenne nationale.
Il est donc temps d’en finir avec les inégalités de traitement et de permettre aux personnes handicapées de pouvoir s’assumer aussi pleinement que les valides. Car, comme le dit Pierre Déalet, alias Peter Patfawl – dessinateur et auteur de BD atteint de dysplasie fémoro-patellaire bilatérale de grade quatre : « Un handicapé n’est pas un type qui attend après sa pension et qui a une place attitrée sur le parking. Non, on vit notre vie normalement et malgré la souffrance quotidienne, on travaille, on produit, on paye nos impôts tout également et on peut être totalement indépendants et autonomes ».